Le 24 au soir était recouvert du lent et discret plaisir de ceux qui se retrouvent alors qu’un cycle lointain s’achève. Les derniers arrivants récupérés à la gare apparaissaient dans l’après-midi, ma tante s’en allait parfois accompagnée, parfois seule, pour assister à la messe de minuit. Mais le repas en soi avait lieu véritablement le 25 au midi, après que les enfants eurent ouvert une partie de leurs cadeaux. Mon oncle Rob se levait très tôt, pendant que la maisonnée dormait encore, pour mettre l’énorme dinde au four, et on ne s’attablait que bien après 13h, au retour de la messe du matin.
Il en va autrement en France. J’arrive vers le 20, et je débute une préparation physique chez Christophe : soupe au petit marron (une sorte de petit potiron), rôti de bœuf, gratin de pomme de terre, puis comme je restais un peu, magret de canard sauce au poivre du père de Nadège. Le 24 arrive, et là comme tous les français, sauf peut-être quelques familles très religieuses, on attaque le repas du réveillon. Qu’était-ce donc que le réveillon ?
« Au départ, en France et au Canada, ce repas nocturne, pris au retour de la messe de minuit, consistait en une simple collation se limitant à des biscuits ou à un morceau de tourtière, accompagné d'une boisson chaude. Avec les années, cette collation se transforma peu à peu en un repas plus copieux et plus élaboré ».
Tout le monde connaît l’histoire des trois messes basses : « Le fait est que chaque fois qu’elle tinte, cette sonnette du diable, le chapelain oublie sa messe et ne pense plus qu’au réveillon. Il se figure les cuisiniers en rumeur, les fourneaux où brûle un feu de forge, la buée qui monte des couvercles entr’ouverts, et dans cette buée deux dindes magnifiques, bourrées, tendues, marbrées de truffes » (A. Daudet).
Il semble cependant que les coutumes ont changé. Le réveillon c’est l’occasion de manger des huîtres et des choses poissonneuses me semble-t-il. Nous prîmes du foie gras en entrée. Quant au plat principal, il se manifesta sous l’audacieuse forme d’un vol au vent rempli de quenelles de brochet, langoustines, et grenouilles. Pour le jour de noël, une quarantaine d’huîtres en provenance de l’île de Ré en entrée. Je suis fier de dire que j’ai appris à ouvrir ces bestioles en cette occasion (mieux vaut ne pas avoir à le faire, c’est un coup à s’arracher la main). On mange les huîtres avec leur eau, un peu de citron, ou une petite sauce échalote vinaigre.
Puis vint le chapon, le classique français, dont on ne m’avait pas donné les abats, et que j’avais rempli d’une farce indiquée par Monetti. A base de poulet, de veau, de lard, champignons, un verre de porto, un peu de panure, des herbes. Ca avait l’air bien avant d’enfourner, mais c’était décevant dans les assiettes. L’année prochaine je reviens au classique britannique. Ensuite fromage. Puis, comme nous avions mangé la bûche la veille, pudding (rappelons à nos amis français qu’il se mange chaud et couvert d’alcool, avec une boule de glace vanille ou un peu de crème en accompagnement). La tradition veut que l’on poursuive ainsi jusqu’à la St Sylvestre. Après c’est régime.
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